Citronnier


Les bois donnant la couleur jaune sont très recherchés par les ébénistes, mais peuvent être fournis par des arbres d'espèces différentes. Le bois jaune le plus universellement apprécié est celui du citronnier de Ceylan. A défaut on fait appel au bois citron dit citronnier de Saint Domingue (Zanthoxylon flavum), au bois de chandelle, appelé aussi bois citron (Amyris elemifera), au fustic dit bois jaune de Guyane (chlorophora tinctoria), au santal citrin (Santalum album) et plus récemment à l'iroko africain, (Chlorophora excelsa).

Il faut noter que dans les inventaires après décès d'un assez grand nombre d'ébénistes on trouve souvent des stocks de bois jaune et que les listes d'importations signalent aussi du bois jaune sans que l'on puisse déterminer duquel de ces bois il s'agit. Ce bois semble aussi avoir été désigné sous le terme de "gros jaune de Hollande" étant donné que bon nombre de nos bois exotiques arrivaient par Amsterdam.



Citronnier de Ceylan


Chloroxylon swietenia
(Rutaceae)



Habitat : Sri Lanka, centre et sud de l'Inde

Caractéristiques :

Hauteur de l'arbre : 20 m

Couleur :

Jaune pâle ou jaune doré lustré.
Grain très fin souvent moiré ou rayonné. Fil ondulé, rubanage irrégulier.

Citronnier - Ceylan Satinwood - Satinholz



Utilisation :

Le citronnier fait son apparition comme presque tous les bois exotiques au début du XVIIIème siècle, lorsque, lassé de l'ébène, on cherche à égayer les façades des meubles par des bois de couleur clair. Cressent utilise le citronnier aux environs de 1730 pour une commode et un bureau en bois de rose. Roger Van der Cruze Lacroix, au milieu du siècle, compose une marqueterie en bois de rose et citronnier. Carlin, vers 1775, emploie du citronnier pour une commode et une paire de meuble d'appui. Étienne Avril l’utilise en placage avec de l'acajou pour un meuble à hauteur d'appui. On pourrait multiplier les exemples. Tout au long du XVIIIème siècle, le citronnier de Ceylan est le bois jaune le plus apprécié. Roubo fait une erreur en confondant le citronnier de Ceylan avec ce que les Romains appelaient "citrus" (Juniperus oxycedrus), connu en France dès le Moyen-âge sous le nom de "cade".


Les ébénistes qui travaillent pendant la période révolutionnaire et sous l'Empire ne renoncent pas à ce bois précieux. Weisweiler a dans son atelier un stock important de citronnier et, par exemple, pour une table à écrire sur un bâti de chêne, il exécute un placage de citronnier, amarante, ébène et satiné. Bernard Molitor entre 1798 et 1803 est un grand utilisateur de citronnier : commode, secrétaire, bureau de dame...Marcion livre pour le pavillon de Monceau en 1811, quatre consoles d'applique en citronnier incrustées d'amarante. Une chaise appartenant au Mobilier national adopte la même facture. Ces derniers exemples sont symptomatiques de la vogue que va connaître le citronnier sous la Restauration, soit pour égayer des surfaces sombres en acajou, palissandre ou ébène, soit pour prendre place dans le mobilier en bois clair très recherché à cette époque.

Dès 1811, F.H.G Jacob-Desmalter utilise le citronnier pour une table vide-poche, un lit de repos, deux tabourets à accotoirs. Il exécute aussi un très beau mobilier de salon, actuellement au Musée de Langres, en palissandre incrusté de citronnier.

Une prestigieuse commode faite par Giroux en 1826 pour Mademoiselle, future duchesse de Parme, est fabriquée en citronnier massif magnifique et très rare. Les Bellangé font grand cas de ce bois. A l'Exposition de 1827, ils présentent un secrétaire en citronnier et tout au long de leur carrière, ils fabriquent de nombreux meubles où le citronnier est combiné avec de l'amarante. Le citronnier sert aussi pour l'intérieur des meubles.



Citronnier de Saint Domingue


ou Bois Citron


Zanthoxylon flavum

Fagara flava
(Rutaceae)



Appellations : Citronnier ou Bois Citron - Satinwood - Zitronenholz

Habitat : Sud de la Floride, Antilles (Puerto Rico, Jamaïque, Saint Domingue), Bahamas

Caractéristiques :

Hauteur de l'arbre : 12 m. Diamètre : 0.40 à 0.50 m

Couleur : jaune crème à jaune citron

Utilisation :

Le bois citron est parvenu dans les régions côtières au début du XVIIIème siècle. Il est rapporté par les marins qui faisaient escale dans les Antilles où ce bois était abondant et servait à arrimer les cargaisons.

Les menuisiers des ports de l'Atlantique ont donc disposé de ce bois dur, d'une très belle couleur jaune pâle pour exécuter du mobilier. Le bois citron est rarement utilisé seul, mais en entourant ce bois clair de bois sombre on obtient un bel effet décoratif. Le bois sombre est de l'amarante ou même du chêne. Le bois citron est aussi mêlé à de l'acajou clair (Swietenia macrophylla).

A Paris, ce bois semble avoir été rarement employé ; sans doute, à défaut de citronnier de Ceylan, on s'en sert dans la marqueterie. Savary des Brulons, ainsi que Roubo, le confondent avec le bois de chandelle, ces bois provenant essentiellement des Antilles.

Dans les rares cas ou on emploie le terme " bois citron" on peut se demander s'il n'y a pas erreur. L'armoire "antillaise" du Musée des arts décoratifs de Bordeaux est peut-être en citronnier de Saint Domingue. La citation tirée de Leben à propos de Molitor du "Journal des Luxus und des Modern" (1794) fait penser qu'il s'agit plutôt de bois citron que de citronnier de Ceylan car "Sattin wood" peut s'appliquer dans les deux cas.

Ce bois est donc extrêmement difficile à détecter dans le mobilier français. Il fait partie de ces "bois jaunes" dont on ne précise pas la provenance ni, à plus forte raison, le nom scientifique. Seule une analyse de laboratoire pourrait décider de sa présence dans certains meubles. L'arbre existe encore aux Antilles.

Sources bibliographiques

"Les bois d'ébénisterie dans le mobilier français"

Jacqueline Viaux-Locquin
Paris Léonce Laget - 1997

"Bois"
Essences et variétés

Jean Giullano
Editions H. Vial - 1996